Table à transformations en chêne, acajou, bois de rose, cuivre, bronze doré, maroquin rouge rapporté.
Attribuée à David Roentgen (1743-1807), Maître à Paris le 19 mai 1780.
Neuwied, vers 1785-1790.
Hauteur : 75 cm – Largeur : 76 cm – Profondeur : 63 cm
Bibliographie :
Hans Huth, Roentgen Furniture : Abraham and David Roentgen, European Cabinet Makers, Londres, 1974.
Christian Baulez, David Roentgen et François Rémond. Une collaboration majeure dans l’histoire du mobilier européen, L’Estampille/L’Objet d’Art n°305, septembre 1996.
Achim Stiegel, Präzision und Hingabe.Möbrlkunst von Abraham und David Roentgen, Berlin, 2007.
Wolfram Koeppe et alii, Extravagant inventions, the princely furniture of the Roentgens, New York, 2012.
De forme ovale, cette table présente une ceinture divisée en quatre compartiments soulignés de bandes brettées ponctuées de pastilles aux angles, en bronze doré, délimitées par les quatre pièces de raccordement des pieds, ornées de triglyphes en cuivre surmontées d’appliques circulaires de bronze perlées et ornées d’un motif rayonnant et d’une guirlande au centre. Les pieds en gaine coiffées de chapiteaux de bronze, finissent à la partie inférieure par des cubes soulignés de moulures aussi en bronze doré, montés sur des éléments sphériques tournés, légèrement évasés vers le haut. Le plateau est ceint à son tour d’un tore de bronze. Montée à coulisse et à bouton de pressage dissimulé, la partie antérieure de la ceinture s’ouvre sur une tablette gainée de maroquin formant écritoire, elle-même coulissante, qui laisse découvrir quatre petits tiroirs disposés en deux rangs superposés et munis de poignées à jours de bronze. Les côtés de la ceinture s’ouvrent à charnières formant deux autres nécessaires : de forme arrondie, avec un pan coupé, chacun de ceux-ci présente quatre petits tiroirs, eux-aussi munis de poignées en bronze ajouré, dont ceux à la partie supérieure sont feints et dissimulent à l’arrière un compartiment vide. Les parties intérieures du tiroir et des nécessaires de la table sont recouvertes en placage de bois de rose, alors que l’extérieur du meuble est recouvert en acajou blond.
Après son premier séjour à Paris en 1774 et sous l’influence du néoclassicisme qui s’était déjà imposé dans les arts décoratifs de la capitale, Roentgen renouvela le répertoire formel de sa production de meubles, renonçant définitivement aux sinuosités encore rocaille caractérisant jusqu’alors ses créations. L’ébéniste allemand, qui revint à Paris en 1779, où il installa sa boutique d’abord rue Saint-Martin, puis rue de Grenelle-Saint-Honoré (partie de l’actuelle rue Jean-Jacques-Rousseau, entre les rues du Louvre et Coquillière), et y vendait, selon la réclame qu’il inséra dans Les Affiches, Annonces et Avis divers du 8 janvier 1781, des bureaux de différentes formes, des fauteuils de cabinet, des tables à toilette, coffres-forts mécaniques, pianofortes, tables à quadrille, à trictrac et autres en bois d’acajou bien fini et poli comme le marbre.
L’élaboration des tables ovales, avec leurs pièces de raccordement en ceinture ornées de triglyphes ou de simples cannelures et leurs pieds en gaine, correspondant parfaitement à cette nouvelle esthétique classicisante, doit être située dans la période 1774-1780. Il continua de les produire jusque vers 1790 et peut-être même au-delà de cette date. Roentgen les déclina en deux variantes. Les plus anciennes sont décorées sur le plateau et sur les compartiments de la ceinture de marqueterie de bois de rapport, parfois avec des scènes complexes où les personnages sont inspirés d’œuvres du peintre Januarius Zick, comme sur deux tables conservées au Rijksmuseum d’Amsterdam, ou bien avec de simples rubans disposés en losanges ou en guirlandes agrémentés de bouquets de roses, comme deux autres tables des collections du Metropolitan Museum of Art de New York ou du Victoria and Albert Museum de Londres, cette dernière ayant les pieds démontables pour permettre le transport. Les tables plus tardives, comme la nôtre et une seconde très similaire (ill.), à peine plus petite, dépourvues de tout motif marqueté dont la structure est soulignée par des éléments inspirés de l’architecture, annoncent l’esthétique du Directoire.
On remarquera également sur toute cette série de tables ovales les poignées ajourées des tiroirs intérieurs d’un modèle très spécifique, réalisés vraisemblablement en Angleterre, où, l’on sait, Roentgen se fournissait en accessoires de bronze. Il semble aussi évident que ces tables étaient exécutées dans l’atelier de Neuwied de l’ébéniste et arrivaient démontées dans sa boutique parisienne où elles étaient commercialisées avant la fin de l’Ancien Régime et pendant les premières années de la Révolution.
1 B.n.F., V 28296, p. 62.
2 Inv. BK-16678 et BK-16677, voir Achim Stiegel, Präzision und Hingabe.Möbrlkunst von Abraham und David Roentgen, Berlin, 2007, cat. 8-9, p. 82-90.
3 Inv. 58.75.39.
4 Inv. 105 : 1 to 9-1882.
5 Vente, Cologne, Lempertz, 20 mai 2016, n°1070.