Bureau mazarin en marqueterie de fleurs à deux corps latéraux, chacun à trois tiroirs, et à caisson médian surmonté par un tiroir légèrement convexe en ceinture, ce bureau dont on connaît l’existence depuis 1965, lorsqu’il fut adjugé sous le marteau de maître ADER au palais Galliera, présente une riche marqueterie de fleurs en bois de rapport, notamment un vase posé sur une campane entouré par deux grands rinceaux sur le plateau, et un oiseau posé sur un fleuron d’acanthes, entouré par deux gerbes de fleurs sur la partie médiane, légèrement bombée, ainsi que les tiroirs latéraux.
Le bureau repose sur deux groupes de quatre pieds en gaine, à chapiteaux godronnés et embases ornées de palmettes d’acanthe, le tout monté sur des boules aplaties, elles aussi à motifs godronnés, et est ceint par six montants droits disposés à quarante-cinq degrés aux angles, ainsi que les gaines, détail qui confère une certaine monumentalité à l’ensemble du meuble.
Bâti en résineux, noyer, ébène, marqueterie de bois de rapport, [bronze doré ?]
Epoque Louis XIV. Paris, vers 1675.
(accidents, manques, restaurations, fentes)
Hauteur : 80 cm – Largeur : 117 cm – Profondeur : 68 cm
La marqueterie de grande qualité de ce bureau laisse entrevoir une oeuvre due à l’un des importants ébénistes parisiens de la seconde moitié du XVIIe siècle. Cependant, malgré quelques éléments originaux dans leur conception, les motifs récurrents de son décor ne permettent que de le rattacher à une série analogique à développement multiple, telle que l’avait définie Calin DEMETRESCU dans son ouvrage sur les ébénistes de la Couronne pendant le règne de Louis XIV. Par exemple, si on se rapporte à la présence de l’oiseau marqueté sur le battant du caisson médian, nous retrouvons ce motif sur plusieurs cabinets et tables attribués tantôt à Pierre GOLE (notamment sur un cabinet faisant partie des collections du
musée de San Francisco, ou sur celui ainsi que sur la table conservés à Burghley House, Stamford, Royaume Uni), tantôt à RENAULT ou Nicolas GAUDRON (tel le cabinet de Rijksmuseum d’Amsterdam, donné auparavant successivement à GOLE, puis à BOULLE, ou bien sur différentes commodes), enfin sur des meubles précoces en marqueterie de bois de rapport d’André-Charles BOULLE lui-même (comme sur un cabinet ou sur une armoire conservée au Louvre ), etc. Mais, hormis ces grands noms de l’ébénisterie parisienne, ce type d’oiseau se retrouve représenté sur de pièces issues d’ateliers d’autres artisans décorateurs du bois moins connus, tel Pierre DANEAU, dont une commode fut vendue à Paris en 2017. Hormis les ébénistes travaillant directement pour la Couronne, la capitale et le faubourg Saint-Antoine comptaient sous le règne de Louis XIV, un nombre impressionnant d’artisans, dont quelques ateliers, connus seulement par les documents d’archives, s’avèrent de la première importance, par leur production ou bien par le volume de leurs affaires. Ainsi César CAMPE qui avait livré le Garde Meuble de la Couronne
possédait lors de son décès en 1685, l’un des fonds de commerce le plus important de Paris. C’était également le cas de LAURENT et de son fils, Pierre LELIBON, ou de celui de François YESMELIN, les deux apparentés à Alexandre-Jean OPPENORDT. On sait ainsi qu’en 1678, Pierre GOLE avait livré pour le duc de VERMANDOIS et pour Mlle de BLOIS trois bureaux de moyenne grandeur, dont l’un de marquetterie fonds d’ébeine orné de tous les costés de feuillages avec des tiroirs et une armoire s’ouvrant par-dessus
en manière de cassette, un autre de bois de noyer richement orné de pièces de rapport à fleurs arabesques par huit colonnes, bases et chapiteaux avec plusieurs tiroirs en dedans ayant leurs serrures dorées, le dernier en bois de cèdre toute unye avec son armoire et des tiroirs aux cotés.
Dans l’atelier de César CAMPE, se trouvaient en 1686, non moins de soixante-sept bureaux, dont un bureau de bois violet à roses, de trois pieds quatre poulces [108,27 cm] de longueur sur vingt-cinq poulces [67,68 cm] de large, brisé avec son gradin, estimé 80 livres, un autre bureau à fond d’ébeine non brisé sur termes carrez remply de fleurs et de rainceaux de trois pieds sept poulces [116,39 cm] de long sur deux pieds [64,96 cm] de large et deux pieds huit poulces [86,62 cm] de haut prisé la même somme,
etc., ce dernier ne manquant pas d’évoquer notre bureau.
Provenance :
Vente à Paris, Palais Galliera, 3 février 1965, n° 134 du catalogue puis
vente Versailles, Maître Blache, 10 décembre 1967, n° 81 du catalogue.