Suiveur de Piero DELLA FRANCESCA, vers 1460
Saint Antoine de Padoue et saint Bernardin de Sienne
Panneau de peuplier peint au revers et renforcé (restaurations anciennes).
Panneau de dévotion.
Peinture à l’œuf sur panneau de bois de peuplier rectangulaire, cadre moderne.
64 x 65 cm – Epaisseur : 1,5 cm
Etat :
Panneau légèrement bombé présentant deux fentes visibles renforcées au revers par deux baguettes de bois placées dans le droit fil et deux traverses à contre fil.
Surface picturale : manque visible dans le bas du panneau et restaurations importantes.
La surface picturale de ce panneau ayant conservé les barbes de peinture du pourtour, l’hypothèse d’un fragment doit être écartée et le format et les dimensions considérés comme originaux.
Inscription :
Autour du disque en lettres classiques dorées sur fond noir : MANIFESTAVI NOMEN TUUM HOMINIBUS QUOS DEDISTI MICHI (sic) J’ai proclamé ton nom aux hommes que tu m’as donnés(Saint Jean : 17, 6-9).
Iconographie :
Les deux saints représentés sur ce panneau, saint Antoine patron de Padoue (1195-1231) et saint Bernardin de Sienne (1380-1444) sont reconnaissables à leur aspect physique, leur habit de bure franciscain et leur attribut : un lys symbole de pureté pour saint Antoine, et le disque enflammé, montré seul ou placé sur une tablette pour saint Bernardin. Cet élément est ici porteur du Christ crucifié en son centre au lieu du trigramme habituel IHC. Autour apparaissent les paroles, sloganque Bernardin prononçait lors de ses prêches effectués dans de nombreuses villes d’Italie tout au long de sa vie, en particulier à Sienne en 1427 et 1431. Ils ont été pérennisés par deux tablettes peintes par le siennois Sano di PIETRO(1406-1481) (cf. B.Berenson, Italian Pictures of the Renaissance, Central Italian and North Italian Schools, Londres, 1975, vol.II, fig.583).
Le culte de saint Bernardin se répandit après sa mort, accompagné de l’image officielle que réalisa en premier en 1444 le peintre siennois Pietro di GIOVANNI AMBROSI(1410-1449) suiveur de SASSETTA. (Sienne, Pinacoteca Nazionale, n°203, cf. P. Torriti, La Pinacoteca Nazionale di Siena, I dipinti dal XII al XV secolo, Gênes, 1977, p. 300-301 repr.).
Bernardin apparaît généralement seul, en pied, sous les traits d’un vieillard au visage émacié dû aux
privations de son ascèse, exhibant d’une main la tablette ou le disque porteur des lettres gothiques du nom du Christ et de l’autre le livre de la sainte parole. Au cours du temps, il a pu être associé à d’autres saints dans les tableaux dits de « Sainte Conversation » entourant la Vierge et d’autres saints. Cette vénération semble s’éteindre au début du XVIesiècle.
Style :
Sur un fond coloré en bleu, l’auteur de notre tableau a choisi de montrer saint Bernardin en compagnie du seul saint Antoine, tous deux la tête auréolée, peints à mi-corps et placés face à face devant un parapet sur lequel reposent deux livres. De leurs mains, ils maintiennent élevé le disque aux proportions hors norme où le crucifié se détache au centre d’une couronne de flammes dorées lui conférant ainsi une importance primordiale. Le nimbe de saint Bernardin indique une exécution effectuée après 1450, date de sa canonisation. A notre connaissance, il n’existe pas d’autre panneau présentant le message du prédicateur dans une vision aussi rapprochée. Sans pouvoir l’affirmer, il pourrait s’agir d’un manifeste que l’on exhibait lors de processions ?
L’attention portée à l’expression spatiale et les caractères de monumentalité et de luminisme, la blancheur des carnations – traits qui se dégagent de ce panneau inédit permettent de placer son exécution dans l’entourage de Piero della FRANCESCA, à l’époque des fresques d’Arezzo réalisées à partir de 1452.
Aux côtés du maître de Borgo San Sepolcro, la critique a mis en lumière la présence d’aides dont les noms connus de Giovanni da PIAMONTE, Lorentino d’ANDREAet Lazzaro VASARI, aux côtés d’artistes anonymes oeuvrant dans la cité du Casentino. (cf. G. Damiani, In torno a Pieroin L. Berti, Nel raggio di Piero,exposition San Sepolcro, Casa di Piero, 11 Juillet-31 octobre 1992, p. 67-83).
C’est sans doute à l’un de ces derniers artistes qu’il faut attribuer la paternité de notre tableau, peut-être Lorenzo VASARI, aïeul du biographe Giorgio VASARI, « ami » de Piero della FRANCESCAauprès de qui il aurait travaillé lors de la présence à Arezzo du grand maître de Borgo San Sepolcro. Les vies des meilleurs peintres sculpteurs et architectes, ed. A. Chastel , Paris 1983, vol. 3, p. 367-373). Cet artiste serait l’auteur de fresques dans des églises à Pérouse, Assise et Arezzo.
Cependant, cette liste d’ouvrages admise par F. Todini (La Pittura Umbra dal Duecento al Cinquecento, Milan 1989, vol. I, p.332, vol. II, fig.793-799) a été contestée lors des célébrations du cinquième centenaire de la mort dePIEROpour finalement ne laisser àLORENZOque la paternité du Saint Vincent Ferrer (Arezzo, église San Domenico ; cf. Damiani, op. cit. p. 73, fig. 8).