Portrait d’homme, 1736 Huile sur toile rentoilée, au dos sur le châssis inscription très certainement recopiée après rentoilage à partir de celle qui devait figurer sur la toile originale: Peint par hyacinthe Rigaud en 1736. 79 x 63 cm Provenance: Collection particulière Qu’il s’agisse de la composition, de la vêture du modèle ou de la manière, notre oeuvre peut être utilement mise en relation avec des portraits des années 1730-1740 qui reviennent sans contestation possible à Hyacinthe Rigaud. La belle cravate de dentelle à pompon est aussi celle de Jean François de La Porte (1675-1743) peint en 1733 (Meslay, Hôtel de ville, salle du Conseil), de l’ambassadeur Abraham Van Hoey (1684-1766) peint en 1735-1736 (vente Deauville, Artcurial, 4 juin 2011, lot 8) ou de l’inconnu dont le portrait passa en vente à l’hôtel Drouot, le 13 décembre 1985, lot 123. L’ample manteau qui dissimule bras et mains, avec ses effets de revers en satin moiré, de bouillonnements et de décoloration du velours qu’effleure la lumière est tout à fait caractéristique des dernières années de production du maître, de même que l’impression de saturation de l’espace de la toile par la figure. Au-delà de ces traits récurrents de composition et de vêture, on retrouve dans notre buste ce qui constitue la marque de fabrique de Rigaud: légère humidité du regard au coin de l’oeil, subtilité dans le rendu des carnations et des différentes textures, travail dans la pâte (bien visible malgré l’écrasement de la matière due au rentoilage) à certains endroits bien circonscrits, jeu avec la préparation rouge sous-jacente comme dans la perruque… Quant à la palette, elle joue sur des harmonies très particulières qu’affectionne Rigaud à la fin de sa carrière, mariant le mauve fané et le bleu canard. Notons qu’à cette époque, le maître n’emploie plus aucun collaborateur et officie seul. Sans indice supplémentaire, l’identité de notre homme est difficile à établir. Les livres de comptes de l’artiste livrent pour l’année 1736 quelques noms de clients dont les portraits ne sont pas encore connus et répertoriés: quelques gentilshommes anglais faisant le Grand Tour; Louis Paul Boucher (1656-1736), ancien marchand drapier, secrétaire du roi, dont la tête du portrait, selon les livres de comptes, « n'[était] pas tout à fait achevée, ledit sr Bouchet étant venu à mourir subitement dans le cours des séances, le 13 7bre 1736 »; enfin, un certain « Mr Robion, de St Malo », qui n’est autre que le négociant René Robiou, sieur Du Lupin (1680-1752). Il convient d’ajouter que les livres de comptes sont loin d’être exhaustifs et que la plus grande prudence s’impose donc dans toute tentative d’identification d’un modèle peint par Rigaud. Nous inclurons ce tableau dans le catalogue raisonné de l’oeuvre de Hyacinthe Rigaud que nous nous apprêtons à publier aux éditions Louis Faton. Ariane James-Sarazin 26 mai 2011